Tout pour elles !
Corinne de "Tout pour Elles" m'a interviewée la semaine dernière.
Un
plaisir d'avoir échangé avec cette journaliste qui pense "que les
femmes ont tout pour elles, tout pour réussir, tout pour s'épanouir,
mais parfois elles ne le savent pas ou elles en ont peur."
L'article est ici ! (faut cliquer !!)
Samedi 02 Septembre 2006 (Journaliste Corinne de "TOUT POUR ELLES")
Profession : femme au foyer
Lorsque
j’étais jeune (oui, c’est mamie Corinne que vous lisez-là…), l’école
nous demandait souvent de remplir des formulaires. Il s’agissait de
préciser son nom, prénom, adresse, date et lieu de naissance,
profession du père, profession de la mère. Je restais souvent le stylo
suspendu au-dessus de cette dernière question. "Maman, appelais-je,
qu’est-ce que je mets pour profession de la mère ?". Elle soupirait et
selon la hauteur de la pile de linge, de l’état de la vaisselle dans
l’évier, de la grosseur de la boîte à couture, du nombre de traces de
doigts sur le frigo, de la longueur de la liste des courses, elle
répondait : "Mets juste un trait" ou "Ecris : sans profession" ou "Tu
n’as qu’à marquer : mère au foyer".
Cette mise en bouche
personnelle pour vous signaler qu'aujourd’hui, il existe environ 2,5
millions de femmes au foyer en France. Certaines se regroupent pour
rompre leur isolement, sortir de l’anonymat, crier leur manque de
reconnaissance. Le plus connu et le plus dynamique de ses réseaux est
sans doute celui des Femmes au Foyer (ou FAF). Créé en septembre 2005,
son forum compte près de 2 000 inscrits. Sa fondatrice s’appelle
Marie-Pierre. Elle a 38 ans, deux enfants (7 et 3 ans), c’est une
ancienne directrice artistique et illustratrice. Elle a crée sa propre
agence de communication avant de décider de se "consacrer à sa
famille". J’ai trouvé intéressant de la titiller un peu sur son côté
"femme aux 100 métiers". Je vous livre le résultat de nos échanges.
Garanti sans langue de bois !
Pourquoi préfères-tu parler de "métier" lorsqu'il s'agit d'évoquer la "position" de la femme au foyer ?
"Outre
le fait qu'elle s'occupe la plupart du temps de ses enfants et de sa
maison, une femme au foyer gère souvent le budget, panse les bobos,
s'improvise pédopsychiatre dans les moments difficiles, peintre quand
il s'agit de repeindre la chambre du petit dernier, cuisinière pour
régaler chaque jour, etc. Au final, on dénombre presque cent métiers
!!! Et les contraintes sont similaires à celles d’un travail dans une
entreprise : la quotidienneté de certaines tâches, des horaires à
respecter, des objectifs à remplir. A contrario, et c'est bien pour
cela que ces femmes acceptent les plus basses besognes, nous avons la
joie de nous organiser comme nous le souhaitons, le plaisir de voir nos
enfants grandir et surtout, endosser le rôle pas toujours facile du
"pilier central" de la famille."
Tu as toi-même fait ce choix délibérément. Encouragerais-tu d'autres femmes à le faire ? Pourquoi ?
"Oui
j'ai fait ce choix en accord avec mon mari. Mais je n'encouragerai
aucunement une femme à s'arrêter de travailler. Cela doit être un choix
très personnel, mûrement réfléchi. On ne peut pas "encourager" une
femme à faire ce choix, nous pouvons seulement en montrer les aspects
positifs et négatifs. Etre femme au foyer est bien souvent synonyme de
restrictions (un salaire en moins), donc de changements de vie profond,
d'un manque de vie sociale (souvent une femme avec un enfant en bas âge
s'isole malgré elle et ce n'est que quand les petits vont à l'école
qu'elle peut penser à nouveau un peu à elle.) Il y a le regard de
l'autre qui est souvent pénible, puisque la société juge la femme au
foyer comme une population à part : ne rapportant pas d'argent dans le
foyer, elle est forcément inactive (oisive !?) et c'est inadmissible."
Financièrement cela ne créé-t-il pas une dépendance de la femme vis-à-vis de son mari ?
"Une
dépendance totale... et dangereuse ! En cas de décès prématuré du
conjoint par exemple, la femme au foyer se retrouve sans rien, doit
retravailler et on sait à quel point il est difficile de retrouver un
travail après une grande absence sur le marché du travail. C'est bien
pour cela que certaines associations se battent pour un salaire, des
points de retraite..."
Es-tu justement favorable à ce que les FAF bénéficient d'un salaire ? "Milites-tu" dans ce sens ?
"Non,
pas vraiment. Le problème de la femme au foyer n'est pas tant un
problème d'argent en tant que tel (même si bien sûr "ça met du beurre
dans les épinards"!!). Dans notre société, si on ne gagne pas d'argent,
nous n'existons pas. Je pense qu'il serait plus judicieux de leur
permettre de faire des petits métiers, mettre à disposition des lieux
pour garder nos enfants. Il faut savoir qu'à Paris, les enfants dont
les mamans ne travaillent pas n'ont ni accès aux crèches, ni à la
cantine. Autant dire qu'elles n'ont pas une minute pour souffler et ce
n'est pas normal. Dans n'importe quelle structure, les employés font de
vraies pauses dans leur journée ; une femme au foyer... non !! Si une
femme au foyer produit des objets par exemple, ou qu'elle veut proposer
ses services pour un peu de repassage et gagner quelques euros, aucune
solution n'est possible sans être matraquée par des charges, des
impôts, etc...
Je milite clairement pour un meilleur confort de
vie pour les femmes au foyer. Je veux qu'elles apprennent à se sentir
bien dans leur peau de femme (au foyer) et qu'elles s'épanouissent en
tant que personnes. Une femme au foyer ne doit pas se "sacrifier" pour
sa famille. N'oublions pas que la femme au foyer n'a aucun jour de
repos dans l'année !"
Ne penses-tu pas que rester à la maison,
c'est bien lorsque les enfants sont petits, mais compliqué à assumer
lorsqu'on veut retrouver un travail une fois que les enfants ont grandi
et quitté le nid familial ? Ce qui est souvent le cas pour de
nombreuses femmes...
"Je pense que le plus dur pour une femme au
foyer dont les enfants sont partis, c'est le vide soudain qui se
produit. L'impression de ne plus être utile, ni nécessaire, d'où,
souvent un grand désoeuvrement. Il faut préparer ce moment longtemps à
l'avance. Préparer cet avenir en travaillant ou pas ne se fait pas du
jour au lendemain. Il est extrêmement difficile pour une femme au foyer
de retrouver du travail : les patrons d'entreprise pensent qu'elles
sont déconnectées de la réalité, qu'elles seront inaptes à s'adapter au
monde salarial...
Pour moi, il est évident que l'épanouissement de
ces femmes passe par un réseau qui peu se tisser au fil du temps. C'est
pour cela que j'ai mis en place le forum des femmes au foyer, c'est
dans l'espoir qu'elles puissent se regrouper, s'entraider, monter des
projets ensemble, acquérir la certitude de leurs valeurs et de leurs
qualités. Le simple fait d'exprimer leurs doutes et d'avoir des
témoignages et des réponses les aide au quotidien, leur donne les armes
pour aller de l'avant.
Et puis pour conclure, n'oublions pas
que dans nos cent métiers, il y a aussi celui de chef d'entreprise :
"parce qu'il faut bien la faire tourner la baraque !"